CHAPITRE XXXVI
— Filez, Neuf. Défendez-vous si nécessaire, mais ne restez pas là. Vous avez fait du bon boulot.
— J’attendrai le reste de l’escadron pour repartir.
— À plus tard.
Wedge dirigea son vaisseau vers le sol. Les quatre torpilles lancées par Corran et lui n’avaient pas détruit le conduit, mais la bétonnière en flammes permettait de repérer aisément la cible.
Sachant que l’effet de surprise était du passé, Wedge fit descendre son aile X en spirale, à cinq kilomètres de la cible et à quatre klicks d’altitude.
Comme Yan me l’a dit un jour : « La ruse et la subtilité sont parfaites, mais rien ne vaut un blaster pour laisser une impression durable. »
Dirigeant son vaisseau vers la cible, Wedge plongea sur l’incendie.
Des rayons de laser verts venant du poids lourd déchirèrent la nuit. Mynock gémit. Wedge évita les tirs, forçant ses adversaires à configurer constamment leurs canons.
Un véhicule terrestre ne peut pas rivaliser en mobilité avec un chasseur. Ni faire ce que j’ai l’intention d’accomplir.
L’indicateur de distance de sa console égrenait les centaines de mètres tandis qu’il plongeait vers le conduit. Un calme étrange s’empara de lui, malgré le feu d’enfer que subissait son vaisseau. La certitude qu’il devait détruire le conduit, et que les véhicules au sol ne pouvaient rien contre lui en était sans doute la cause.
Wedge ralentit et inversa la poussée du moteur. L’aile X tomba pratiquement en chute libre. Les canonniers du poids lourd cessèrent de tirer, pensant sans doute avoir touché leur cible.
Wedge enclencha les moteurs à répulsion. La chute du chasseur s’interrompit abruptement à cinq mètres du sol.
De la poussière tourbillonna autour de l’aile X. Les canons de la tourelle du poids lourd pivotèrent. Derrière le véhicule, des commandos et des ouvriers s’éparpillèrent.
Wedge lâcha une torpille à protons. Le projectile traversa le pare-brise de l’engin d’assaut, tua l’équipage et s’enfonça dans les entrailles du véhicule, où il explosa. Quand le mastodonte éclata, des morceaux de blindage s’éparpillèrent dans toutes les directions.
Wedge repassa sur les lasers et appuya sur la détente. Les échafaudages s’effondrèrent ; du ferrobéton semi-liquide se répandit sur le sol.
Les commandos couraient comme des fourmis affolées, cherchant désespérément un abri. Wedge ne s’occupa pas d’eux. Il avait un autre objectif en vue.
Repassant sur les torpilles à protons, il en arma deux. Puis il dirigea son réticule de visée sur le conduit de ferrobéton, appuya sur la détente et activa les moteurs de répulsion pour faire remonter son vaisseau.
Les deux torpilles s’enfoncèrent dans le conduit et explosèrent. L’onde de choc ébranla le chasseur et désintégra le tunnel, avant de se propager sur le sol avec tant de force qu’elle souffla les incendies qu’elle rencontra. Les parois du canyon tremblèrent. Des rochers et de la poussière dégringolèrent.
La lueur de l’explosion permit à Wedge de voir une dernière fois la cible. Détruite !
Puis la boule de feu implosa, plongeant le canyon dans l’obscurité.
Wedge poussa l’accélération à fond et largua le réservoir auxiliaire vide.
— Ici Rogue Leader. Mission accomplie.
— Ici Quatre, Leader. Les Mirettes ont été démolies ! Tous les Rogues sont en sécurité. Des Bourdons se dirigent vers vous. Nous arriverons avant eux.
— C’est le moment de rentrer à la maison, Rogues. Filons d’ici ! Neuf est devant nous. Il nous préviendra en cas de problème.
— Négatif, Leader, dit Nawara. J’ai vérifié. Neuf n’est pas en avant de notre position.
Corran pensa un instant désobéir aux ordres de son supérieur. Puis il se rendit à la raison.
Tes réserves de carburant sont épuisées. Il t’a donné une mission, à toi de la remplir. Assure-toi que la voie de retour est libre.
— Whistler, recherche complète au scanner. Je veux un rapport sur toutes les menaces.
L’astromech bipa joyeusement. Il restait trois Mirettes après le combat contre l’Escadron Rogue.
Un escadron de Bourdons arrivait, mais il était loin et ne représentait pas une menace pour Corran, et guère plus pour ses camarades.
Le niveau de danger était très faible.
Mais il augmenta d’un coup.
— Que se passe-t-il ? demanda Corran.
Whistler appela l’affichage tactique à l’écran. Deux des Bourdons tentaient d’intercepter un objet se déplaçant dans l’atmosphère.
— Whistler, sont-ils sur le point d’attaquer une de nos navettes d’assaut ?
Whistler afficha le nom du navire : le Devonian.
— C’est bien ce que je pensais. Page, tu vas me devoir une sacrée faveur !
Corran fit décrire une large boucle à son chasseur.
Le droïd lança un bip interrogateur.
— Oui, je sais ce que je fais. Si j’avance en profitant de ma vitesse acquise au lieu de brûler du carburant, tout ira bien. Inutile que tu calcules le pourcentage de réussite de cette manœuvre ! Ce n’est pas un jeu !
Le plongeon de Corran l’amena à l’arrière des intercepteurs. Il se concentra sur le second Bourdon.
Il lui était impossible d’utiliser les torpilles à protons, car le verrouillage de cible indiquerait aux adversaires qu’il était là. Pour réussir, il lui fallait agir vite ; en clair, il devait avoir l’intercepteur à son premier passage.
Corran poussa l’accélération et s’aligna sur les intercepteurs.
Si je me place correctement, je pourrai peut-être avoir les deux d’un coup.
Il passa sur les lasers et les jumela pour qu’ils tirent en tandem. Quand le réticule vira au vert, il appuya sur la détente et la maintint en position de tir.
Quatre paires de rayons laser rouges touchèrent l’intercepteur. Le vaisseau explosa, forçant Corran à plonger pour éviter le nuage de débris.
Revenant à sa position précédente, il chercha l’autre intercepteur. Il n’était pas en vue.
Corran n’eut pas le temps de se demander s’il avait été détruit aussi. Une volée de rayons laser toucha son bouclier arrière.
Horn renforça le bouclier et chercha le Bourdon sur son moniteur. L’intercepteur apparut derrière lui, et tira de nouveau sur son bouclier.
Qui est ce type ?
— Whistler, conseille aux navettes de transport d’atterrir aussi vite que possible, parce que ce gars est doué.
Whistler bipa. Une question apparut sur le moniteur de Corran.
— Bien sûr, je suis meilleur que lui ! Renforce mes boucliers et accroche-toi !
L’intercepteur se rapprocha de l’aile X. Le Corellien attendit qu’il se trouve à cinq cents mètres, puis il fit virer son vaisseau à tribord.
Accélérant à fond, il appuya sur le gouvernail de gauche. L’aile X se retrouva face au Bourdon.
Les larges ailes de l’Impérial le déséquilibraient. Le vaisseau vira lentement, faisant une cible parfaite. Le premier coup de Corran perça deux trous dans l’aile tribord.
Le second rata la cible.
Le pilote impérial acheva son tonneau et plongea.
Corran le suivit. L’autre fit une série de mouvements saccadés, mais les panneaux solaires de l’aile endommagée rendaient les mouvements vers la droite plus difficiles à contrôler.
Corran visa. Les rayons laser sectionnèrent l’aile droite. Le Bourdon partit en vrille. Corran fila avant de le voir s’écraser. Il espéra que le pilote aurait l’intelligence de s’éjecter.
Horn dirigea son vaisseau vers le point de rendez-vous.
— Neuf à Rogue Leader.
Wedge ne dissimula pas sa colère.
— Vous étiez censé ouvrir la voie, Neuf, pas nous suivre.
— Bien reçu, Leader. J’étais sur le point de filer quand deux intercepteurs se sont montrés.
— Et vous avez décidé de les attaquer.
— Pour venger le général Kre’fey.
Corran supposa que Wedge comprendrait qu’il voulait dire que les ennemis se dirigeaient vers un transporteur de troupes.
Il regarda sa jauge de carburant.
— Leader, j’ai un problème.
— Je sais, Neuf. Votre astromech vient de répondre à ma question.
La voix du Twi’lek retentit sur la fréquence.
— Leader, douze autres Bourdons viennent de décoller et suivent la première vague.
— Leader, ici Quatre. Occupons-nous d’eux. Il n’y en a que vingt-deux en tout.
— Leader, ici Cinq. Je suis d’accord.
Corran sourit.
— Merci, les gars.
— Silence. L’armée n’est pas une démocratie. Nous avons des ordres. Nos chefs comptent sur notre obéissance. (Les haut-parleurs crépitèrent pendant quelques instants.) Mais nous avons un peu de marge pour obéir… Changement de plan. Nous devons aller vers la face éclairée et attirer les Impériaux derrière nous. Neuf, filez vers la face obscure et atterrissez. L’atmosphère est pauvre en oxygène, mais votre combinaison de survie peut le concentrer suffisamment. Si vous parvenez à éviter les ennemis, nous reviendrons vous chercher.
— Je ferai de mon mieux, Leader. (Corran mit son aile X en position.) Quatre, combien en as-tu descendu ?
— Six. Et toi ?
— Trois, en comptant celui du canyon. Ça fait dix-sept en tout ! Je compterai ceux que je descendrai du côté non éclairé de la planète.
— Bien entendu, Neuf.
Nawara intervint.
— Neuf, Gavin est devenu un as !
— Je n’ai jamais douté qu’il y parviendrait. Bienvenue au club.
— Dix secondes avant séparation, Rogues. Neuf, ne vous sentez pas obligé d’être un héros.
— Je suis un Rogue, Leader. Être un héros fait partie du job !
— C’est vrai. Allez-y !
Corran vira vers la gauche tandis que le reste de l’escadron filait tout droit.
— À plus tard, les amis.
Corran ralentit et amena l’aile X très près de la surface lunaire. Il ferma son unité de communication et remit ses détecteurs en mode passif.
— Whistler, trouve-nous une cachette. Pas pour nous dissimuler, mais pour tendre une embuscade.
Le commandant sait très bien que notre manœuvre ne trompera pas tous les pilotes ennemis. Je n’ai jamais eu envie de mourir seul. Emmener des Impériaux avec moi me convient très bien !